Interview de Séna Yawo AKAKPO-NUMADO: « Nous voulons voir comment les subventions de l’Etat arrivent dans les écoles et comment elles sont utilisés ? »
©Afreepress-(Lomé, le 1er Février 2017)- Au terme d’une étude commanditée par l’Etat togolais sur la gestion des subventions publiques qui sont accordées aux établissements d’enseignement général au niveau du 1er cycle, Séna Yawo AKAKPO-NUMADO, Secrétaire technique permanent du Plan sectoriel de l’éducation au ministère des Enseignements Primaire, Secondaire et de la Formation Professionnelle, s’est confié à l’Agence de presse Afreepress. Dans cette interview la gestion faite par les acteurs de l’éducation de cette manne et les insuffisances auxquelles faudrait apporter des solutions à l’avenir.
Voici pour vous l’intégralité de cet entretien.
Afreepress : Quel est le constat qui vous a amené à initier cette recherche ?
Séna Yawo AKAKPO-NUMADO : Il ne s’agit pas d’un constat au Togo seulement. C’est une étude internationale initiée par l’Institut international pour la planification de l’éducation de l’Unesco pour voir un peu dans tous les pays en développement, comment les politiques de gratuité accompagnées de politiques de subvention aux écoles sont mises en place et comment ces politiques de subvention fonctionnent au niveau des bénéficiaires directs que sont les enseignants, les directeurs d’écoles, les élèves et les parents d’élèves. Donc l’étude a démarré depuis plusieurs années et a été effectuée dans d’autres régions du monde. Et à partir de 2015, c’était le tour de quatre pays francophones en Afrique et dans les Caraïbes de l’expérimenter. Le Togo fait partie de cette vague de 2015-2016 et il fallait donc essayer de comprendre les politiques de subvention mises en place par le Togo pour accompagner la suppression des frais de scolarité, voir comment ces deux politiques fonctionnent.
Comme je l’ai dit, nous voulons voir comment les subventions de l’Etat arrivent dans les écoles et comment elles sont utilisés ? Qui prend des décisions concernant l’utilisation de ces fonds et comment les besoins sont identifiés ? Est-ce qu’il y a un mécanisme de contrôle ? Comment fonctionnent ces mécanismes de contrôle et de suivi ? Est-ce qu’il y a des impacts de ces fonds transférés vers les écoles sur l’accès des enfants aux études ? On veut avoir des informations sur l’équité, la qualité et la gouvernance de ces fonds.
Voilà un peu ce que nous avons fait dans cette étude.
Comment se présente le résultat aujourd’hui ?
Séna Yawo AKAKPO-NUMADO : Le résultat nous a permis de comprendre qu’il y a encore des défis à relever. Il y a des points très positifs de la politique mise en place. Dans toutes les écoles, on a remarqué quand même que les fonds ont permis à la scolarisation d’avancer. Donc il y a plus d’élèves qui arrivent dans les écoles. Dans les zones rurales, les parents les plus pauvres ont également eu la chance d’envoyer leurs enfants à l’école parce que ne payant plus de frais de scolarité.
Mais de l’autre côté, on a vu qu’il y a des difficultés. Par exemple, les fonds n’arrivent pas toujours à temps. Et tous les acteurs se sont plaints de cela. Les directeurs d’écoles, les parents et les enseignants disent qu’à la rentrée, les fonds ne sont jamais disponibles à temps. Donc c’est un défi à relever. Il y a aussi quelques problèmes de gouvernance qui provoquent des fois des conflits entre les directeurs d’école et les parents d’élèves qui sont en principe chargés, ensemble de gérer ces fonds pour l’école.
Donc nous avons noté également ces difficultés de gouvernance entre les Comités de Gestion des Ecoles Primaires Publiques, les Associations des Parents d’Elèves (APE) et les directeurs d’écoles. Donc ces défis également ont été relevés.
Un autre défi très important reste le montant de cette subvention que l’Etat transfère chaque année aux écoles pour remplacer les frais de scolarité. Les acteurs s’accordent à dire que le montant est trop faible et qu’il faut que le gouvernement fasse un peu plus d’effort pour que le montant soit suffisant pour faire fonctionner les écoles et décharger les parents. Puisqu’on a constaté que la subvention est faible, et arrive toujours en retard, il y a des pratiques qui ont réapparu dans les écoles alors qu’elles étaient interdites. Par exemple, les cotisations parentales qui sont interdites, ont été remises en place parce que la subvention de l’Etat ne vient pas à temps et ne suffit pas. Il y a l’exploitation des enfants dans les champs, dans les carrières de graviers qui réapparait dans certaines écoles parce que l’argent de l’Etat n’est pas encore arrivé pour assurer le fonctionnement de l’école.
Voilà des défis importants que nous devons ensemble relever.
Interview réalisée par Théophile K.
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